Antje Jackelén. Photo: Albin Hillert/CEC
L’archevêque luthérienne d’Uppsala, Antje Jackelén (Eglise de Suède) avait la parole, en ce cinquième jour de l’Assemblée générale de la Conférence des Eglises européennes (KEK), sur le thème du « témoignage ». Un thème central, lié au titre général de cette Assemblée qui se tient jusqu’au 6 juin à Novi Sad : « Vous serez mes témoins » (Actes 1.8)
L’Europe change : d’une ère où être chrétien était la norme à une nouvelle. Dans cette situation de minorité être un témoin devient particulièrement important. « Par conséquent, témoigner est devenu une part plus visible, importante et exigeante de la vie chrétienne. Cela veut dire que les Eglises, les paroisses et les pasteurs/prêtres doivent apporter une attention plus grande à la façon dont ils forment les hommes, femmes et enfants pour qu’ils deviennent à leur tour de bons témoins », concluait Antje Jackelén.
Evoquant ses visites en des pays tels l’Egypte, le Myanmar ou l’Inde, où les chrétiens ne sont pas seulement des minorités, mais sont également persécutés, l’archevêque pense que les Eglises européennes ont beaucoup à apprendre sur les fonctionnements dans de tels contextes, où l’on peut être confronté à l’ignorance, voire pire. Les circonstances locales doivent dicter les voies du témoignage. « Par conséquent, la demande de témoignage est beaucoup plus ‘fondamentale’. »
L’archevêque a également introduit le concept de l’insatisfaction divine, de Martin Luther King Jr, à l’Assemblée : une source essentielle d’inspiration et d’énergie pour le témoignage. « La communauté noire ne s’est pas seulement tournée vers les Eglises noires pour se nourrir spirituellement par les hymnes et les prières, mais aussi pour y trouver du soutien dans l’action sociale et politique. »
L’archevêque a poursuivi en pointant que le témoignage des femmes avait souvent été méconnu et ignoré. Elle a cité, en exemple, l’évangile selon Luc qui évoque deux témoins, souvent assimilés à deux hommes. Alors que l’un d’eux est nommé Cléopas, l’autre n’est pas nommé. A travers l’histoire, on a toujours considéré que le compagnon de Cléopas était un homme, alors qu’il pourrait tout simplement s’agir de sa femme, étant donné qu’ils vivaient sous le même toit ! » Ceci pourrait être considéré comme du « témoignage par surprise » a-t-elle complété.
Mais, être un témoin n’est pas seulement une affaire de conviction et d’engagement au nom de la foi, mais dépend aussi des expériences que l’Esprit saint nous fait vivre sur le chemin de notre Salut. « La plupart des gens qui sont appelés à témoigner devant la justice n’ont pas cherché à être des témoins mais il le sont devenus parce qu’ils se sont trouvés être là et être entraînés par les conséquences d’un événement. C’est la même chose avec nous : nous sommes des témoins de la foi parce que nous avons été entraînés par l’événement du Christ »
Dans sa réponse à ce discours d’ouverture et dans ses propres réflexions, Tauri Tolpt, chercheur de l’Université de Tartu et membre de la Faculté orthodoxe de l’Institut de théologie de l’Eglise évangélique luthérienne d’Estonie, a suggéré que la clef pour être un témoin avait à voir avec la crédibilité. « Les enfants ne voient pas la vérité dans la forme de nos mots, mais dans la façon dont nous présentons ces mots, dans l’attitude que nous adoptons quand nous témoignons de ces mots. Le monde voit notre témoignage très souvent à la manière des enfants, qui ne prêtent pas attention à ce dont nous témoignons ou ne sont pas touchés par ce dont nous témoignons, mais bien plus par la façon dont nous le faisons. »
Tauri Tolpt a également invité les délégués de l’Assemblée à se positionner sur la façon dont l’Eglise doit se considérer elle-même, suggérant qu’un choix doit être fait entre différents points de vue sur la nature de l’Eglise. « Je crois qu’il y a juste le fil d’un rasoir entre les deux faces du témoignage, ainsi que Saint-Jean Chrysostome décrit symboliquement l’Eglise comme étant à la fois un tribunal et comme un hôpital. »
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